Vous avez surement vu récemment, début avril, des images de requins griset débarqués à Kélibia en Tunisie. Ce n’est pas la 1ère fois que des requins griset sont pêchés au filet appelés kis et débarqués dans ce port de Tunisie. En effet, en juin 2019 un article était déjà paru faisant mention des même faits. L’agence nationale du littoral a porté plainte contre les bateaux incriminés.
La pêche de grand requin blanc a aussi été relatée , un grand requin blanc femelle,pesant 760 kg, a été pêché, en mai 2018, à Zarzis . Ce spécimen, une espèce vulnérable et donc protégée, a été vendu au marché à plus de 5.000 dinars tunisiens .
En Tunisie
La Tunisie est le deuxième plus gros pêcheur de requins de la Méditerranée après la Libye. La Tunisie (4.161 tonnes) et la Libye (4.260 tonnes) assurent des prises trois fois supérieures à celles de l’Italie (1.347 tonnes) et de l’Egypte (1.141 tonnes) (rapport WWF » Les requins en crise : un appel à l’action pour la Méditerranée ) .
Plus de la moitié des espèces de requins et de raies de la mer sont menacés dans la région méditerranéenne et un tiers est pêché à un niveau critique d’extinction.
Au total, près d’une soixantaine d’espèces ont été répertoriées dans les chaluts. Dans certaines zones, les requins et les raies représentent plus du tiers des captures totales à la palangre. D’énormes quantités de requins sont capturées par des filets dérivants et illégaux.
D’autres menaces, pèsent sur les requins de la Méditerranée . En effet, outre la pêche, les requins ingèrent ou s’étranglent avec des morceaux de plastique. Ils sont également la cible d’un commerce illégal, relève la même source, expliquant que des analyses ADN ont montré que de nombreux consommateurs pensant manger de l’espadon de Méditerranée, retrouvent de la viande de requin dans leur assiette.
Cela représente des risques pour la santé humaine, en raison des concentrations de mercure qui dépassent largement les limites légales de sécurité fixées .
Par ailleurs, la pêche sportive ou récréative, le » catch and release « se pratique énormément avec le requin griset .
C’est un requin placide qui est péché dans les profondeurs avec pour appât des calamars . Le requin lutte bien évidemment et même en « catch en release », c’est à dire relâché après avoir été péché , cette pêche est hautement stressante et mortelle pour ces requins . Certains se sont fait une spécialité de cette pêche « au gros » . Ils sont bien évidemment à fuir …
Dans ce rapport, l’organisation a appelé les pêcheurs et gestionnaires de la pêche à éviter de pêcher dans les habitats critiques comme les nurseries et à utiliser des engins adaptés pour éliminer les prises accessoires.
Elle a également mis l’accent sur la nécessité d’améliorer les connaissances sur les populations de requins et les espèces commercialisées afin de renforcer les efforts de conservation et assurer la transparence et la légalité du secteur de la pêche.
Giuseppe Di Carlo, a souligné dans ce sens : «Les requins pourraient disparaître de la Méditerranée. Leur déclin rapide est l’indicateur le plus sérieux du mauvais état de santé de la mer et des pratiques de pêche irresponsables. Tous les pays méditerranéens sont responsables. Les requins font partie de notre mer et de notre culture depuis des milliers d’années. Nous devons agir rapidement pour assurer leur survie dans le futur.
Les requins sont des poissons particulièrement vulnérables. Ils ont du mal à se remettre du déclin de leur population. Ils ont tendance à croître lentement, ils arrivent tard à maturité et produisent le plus souvent peu de jeunes à la fois .
Focus sur le requin griset
Le requin griset est ovovipare . Généralement solitaire, il vit en petits groupes, jusqu’à cinq individus, tous d’une taille inférieure à la limite de maturité.
Il atteint sa maturité sexuelle entre onze et quatorze ans pour les mâles et de dix-huit à trente-cinq ans pour les femelles. Les femelles ont un cycle de reproduction de deux ans et une gestation estimée entre douze et vingt quatre mois.
C’est un requin prolifique . Chaque portée compte entre 20 et 100 petits mesurant de 50 à 70 cm.

Le requin griset, comme beaucoup d’espèces de requins , est menacé par la pêche sportive ou commerciale. De récentes observations démontrent que cette espèce est régulièrement capturée comme prise accessoire dans les pêches du flétan et de l’aiguillat commun. Son corps est source d’huile et également transformé en farine de poisson.

Le requin griset est énuméré comme espèce quasi menacé (NT) sur la liste rouge de l’UICN.
Le requin griset présent sur toutes nos côtes est une espèce méconnue car il vit dans les profondeurs abyssales.
Le requin griset peut mesurer jusqu’à 4,5 m de long mais certains spécimens peuvent dépasser les 6 m pour un poids impressionnant de plus d’une tonne ! Le plus grand requin griset jamais pêché le fut en 1846 en Cornouailles : il faisait 7,95 m de long mais son poids reste inconnu car aucune balance de l’époque n’était capable de le peser! Il peut vivre jusqu’à l’âge vénérable de 80 ans. Sa large tête est profilée avec un museau de forme conique, presque arrondi. Sa bouche est située sous la tête, presque en position ventrale. Sa gueule dispose de 6 rangées de dents triangulaires très tranchantes. Celles situées dans la mâchoire inférieure sont disposées en peignes. Il possède 6 fentes branchiales de chaque coté de la tête alors qu’habituellement les requins n’en ont que 5 – ce qui permet de l’identifier très facilement. Une autre de ses caractéristiques est de ne posséder qu’une seule nageoire dorsale à l’arrière du corps.
Sa peau est de couleur brune foncée tirant sur le gris, ce qui lui a valu son nom. Elle est plus claire sur la face ventrale.
Le griset a la capacité de pouvoir changer de couleur pendant une courte période. Il dispose de grands yeux vert fluorescents qui ont la caractéristique d’être rétractables. Ils rentrent ainsi dans leur orbites afin d’être protégés lorsque le requin attaque. Ces yeux sont uniquement pourvus de bâtonnets. Ils n’ont pas la capacité de voir les couleurs et la vision du griset est donc monochrome.
- Nom commun : Requin griset. Griset. Requin à maquereaux. Lou Mounge (vieux niçois)
- Nom scientifique : Hexanchus griseus
- Famille : Hexanchidés
Le saviez-vous ?
Apparu à la période du Jurassique il y a 140 millions d’années, le requin griset est un poisson qui n’a que très peu évolué depuis la préhistoire. Parmi les requins, c’est même celui qui reste le plus proche des requins primitifs du Dévonien. Sa mâchoire est relativement petite par rapport au corps et d’une mobilité réduite (mâchoire dite « amphistylique »). Ainsi, les requins « modernes » ayant plus évolué tels que le requin plat-nez disposent d’une mâchoire ultra mobile.
Biotope et alimentation
Ce poisson benthique (benthos : fond) vit dans les abysses entre 200 et parfois plus de 2000 m de fonds – ce qui est considérable. Il est néanmoins capable de remonter très haut dans les couches d’eau pour se nourrir– jusqu’à atteindre la surface ! C’est toutefois assez rare car il n’aime pas les eaux tempérées – n’oublions pas qu’il vit dans des profondeurs où l’eau est entre 3 et 5 ° ! Les individus immatures peuvent vivre en bancs assez réduits mais les adultes sont la plupart du temps solitaires. Le requin griset est sédentaire et reste attaché à son territoire. Son aire de répartition est certainement une des plus vastes dans la famille des requins puisqu’on le retrouve dans toutes les mers et océans du globe !
Comme tous les requins, le griset est carnassier. Il chasse principalement la nuit mais également à l‘aube et au crépuscule. Il consomme tous types de poissons osseux, (y compris d’autres espèces de requins), des raies, des mammifères marins, etc. Il est même capable de manger des crustacés ! Une grande partie de son alimentation est constituée de calamars rouges – ces céphalopodes étant très présent dans les abysses. Le griset peut également être charognard et consommer des cadavres aussi gros que ceux de baleines mortes s’échouant sur le fond. Il faut également savoir qu’il peut être cannibale et dévorer des individus de sa propre espèce.
Le saviez-vous ?
Pendant longtemps, des pêcheurs professionnels ont pêché le requin griset avec des palangres au large de Nice ou de Cagnes.Dans les années 70, Nice Matin a fait un article montrant la prise de plusieurs requins grisets records. Le plus gros spécimen pesait alors près de 450 kg. Ces pêcheurs remontaient régulièrement des poissons de 5, 6 à 700 kg de profondeurs dépassant les 1000 m…à la main.Ils ramenaient leurs prises en les remorquant avec leurs pointus à voile. Ils revendaient la chair et également le foie très riche en vitamine A qui était revendu sous l’appellation « huile de foie de morue » (que certains ont pu connaitre bien malgré eux !)
- Auparavant, les requins grisets étaient pêchés à la palangre par des professionnels (extrait Nice Matin des années 70)
- Requin griset pris à la palangre par un professionnel dans les années 60
Le requin griset est toujours victime de la pêche via les filets , pêche à la ligne par des pêcheurs « au gros » . Le plus souvent placide malgré sa taille, c’est une prise de choix pour bon nombre de pêcheurs .
C’est un requin, comme beaucoup de ses congénères qui est victime des actions néfastes de l’Homme . Il est actuellement quasi menacé au vu également de sa maturité sexuelle atteinte très tardivement notamment pour les femelles (18 à 35 ans) .
Il est grand temps que les pays bordant la Méditerranée s’entendent pour mettre en place une législation commune protégeant les requins de cette mer avec une politique offensive pour stopper et réprimander la pêche de ces espèces .
Espérons qu’une prise de conscience, que des actions seront prochainement prises et aussi sous la pressions des diverses associations et organismes travaillant à la protection de ces seigneurs des mers .
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